Afin d’accélérer la transition du secteur bancaire vers la durabilité, finance et développement durable doivent être intégrés dans la formation professionnelle, continue et académique. C’est une condition sine qua non pour que la place financière genevoise demeure à la hauteur des enjeux et des attentes de la clientèle dans ce domaine.
A Genève, la place financière représente un secteur d’activité essentiel puisqu’elle génère plus de 35'000 emplois et contribue à hauteur de 13% du PIB cantonal. Or, l’une des clés du succès de cette industrie réside dans sa capacité à s’entourer des meilleurs talents. Ceci signifie non seulement d’être à même de les attirer, mais aussi de continuer à les former afin de maintenir leur niveau d’expertise.
Selon l’Office fédéral de la statistique, à fin 2020, 43% des collaboratrices et des collaborateurs du domaine bancaire possédaient un diplôme universitaire alors que ce chiffre se montait à 28% pour les autres secteurs économiques. Ces mêmes statistiques révèlent aussi que 23% du personnel avait intégré le secteur bancaire suite à un apprentissage. Ceci démontre qu’il n’existe pas qu’une seule porte d’entrée pour accéder aux métiers de la finance. Cette diversité doit aussi se refléter dans l’offre de formation.
Genève : un écosystème unique
Selon le « Baromètre des opportunités et des préoccupations » publié par Employeurs Banques, les collaboratrices et les collaborateurs portent une attention particulière à la spécialisation accrue des professions bancaires, à la densité réglementaire et à l’employabilité.
Parmi les spécialisations recherchées, la finance durable figure en bonne place. Ce sujet fait désormais partie intégrante des stratégies d’investissement comme le démontrent les statistiques publiées par Swiss Sustainable Finance (SSF) en juin 2022. Le volume des placements durables en Suisse a progressé de 30% entre 2020 et 2021 pour atteindre plus de 1'980 milliards de francs.
Dans ce domaine, Genève occupe une position exceptionnelle grâce à la présence de tous les acteurs susceptibles d’accélérer cette transition verte : les établissements financiers, les asset managers, les organisations internationales, les ONG, un secteur académique de pointe, de grandes fondations privées ainsi que des autorités politiques engagées.
Une palette de formations en perpétuelle mutation
La formation joue un rôle décisif dans la concrétisation d’une stratégie offensive en matière d’investissements durables. Les établissements genevois ont certes développé un savoir-faire pointu en la matière qui leur a permis d’offrir des produits attractifs conformes aux critères de durabilité. Toutefois, pour accélérer ce mouvement, il est essentiel d’intégrer la finance durable à tous les niveaux de formation, de l’apprentissage aux études universitaires, en passant par la formation continue.
Un constat s’impose d’emblée aux acteurs du secteur financier dans son ensemble : les collaboratrices et les collaborateurs montrent un intérêt marqué pour les stratégies durables et souhaitent acquérir les connaissances nécessaires à appréhender ce domaine aussi prometteur que complexe, afin de pouvoir répondre aux attentes de la clientèle.
Genève bénéfice aujourd’hui déjà d’une offre remarquable. La Haute école de gestion (HEG), en partenariat avec SSF, ainsi que l’Institut Supérieur de Formation Bancaire (ISFB) proposent des formations continues certifiantes en finance durable.
Dans le domaine de la gestion de fortune, la certification SAQ CWMA, qui a été mise en place en 2017 et représente le benchmark dans la branche, renforcera dès 2022 les exigences relatives à la durabilité. De cette manière, les 16'000 conseillères et conseillers certifiés SAQ CWMA en Suisse accroîtront encore leur niveau d’expertise.
En lien avec l’apprentissage, une réforme majeure entrera en vigueur à l’été 2023. La nouvelle formation commerciale de base intègrera mieux le sujet clé du développement durable. D’une part, les produits financiers durables seront largement traités et, d’autre part, le développement durable sera au cœur de l’enseignement dans le domaine des compétences de conseil.
La formation académique n’échappe pas à la vague verte. A Genève, l’Université s’engage dans ce mouvement avec plusieurs « Certificate of advanced studies (CAS) » et Masters dédiés à la finance durable. Enfin, le Graduate Institute a également pour ambition de former les spécialistes en finance durable grâce au « Certificate of advanced studies (CAS) SDG investing » ainsi qu’au lancement à l’automne 2022 d’un Master en finance durable.
L’autoréglementation : un nouveau pas est franchi
La Place financière n’est pas en reste dans ce vaste mouvement.
Le 28 juin 2022, l’Association suisse des banquiers (ASB) a publié une autoréglementation qui sera contraignante pour ses membres. Cette dernière a édicté les prescriptions minimales suivantes : des Directives relatives aux préférences ESG et aux risques ESG dans le conseil en placement et la gestion de fortune ainsi que des Directives pour les fournisseurs d’hypothèques relatives à l’amélioration de l’efficacité énergétique des bâtiments.
Ces deux textes représentent un pas important vers l’intégration du développement durable dans le conseil à la clientèle. Ils comportent des exigences spécifiques en matière de formation, qui nécessiteront un engagement considérable des établissements bancaires. Pour le conseil en placement, les collaboratrices et les collaborateurs devront disposer des connaissances nécessaires sur le développement durable, les solutions de placement ESG et les approches ESG applicables. En lien avec l’immobilier, les spécialistes hypothécaires devront bénéficier de formations sur la manière de préserver la valeur des immeubles à long terme et à améliorer l’efficacité énergétique des bâtiments.
Ce panorama démontre qu’aucune voie ne doit être négligée afin de répondre au défi posé par la transition durable. La mise en place de stratégies d’investissement au bénéfice non seulement de la clientèle mais aussi de l’ensemble de la société passe par la formation. Cette dernière demeure un outil central. D’une part, elle satisfait une ambition sociale forte : permettre à chaque collaboratrice et à chaque collaborateur d’évoluer et de donner du sens à l’ensemble des fonctions qu’ils exerceront tout au long de leur carrière. D’autre part, elle constitue un moteur de changement puissant, permettant de passer de la parole aux actes.