Document only in French
La Fondation Genève Place Financière recommande le rejet de l’initiative pour un impôt fédéral sur les successions.
Le nœud du problème réside dans le risque que cette initiative fait courir aux PME. Or, selon l’Office fédéral de la statistique, les PME forment plus de 99% des entreprises et génèrent deux tiers des emplois en Suisse. Le seuil des CHF 2 millions mentionné dans l’initiative serait vite atteint à cause des biens immobiliers et des moyens de production présents dans les entreprises. L’introduction d’un impôt sur les successions mettrait en péril la transmission des sociétés familiales, car il contraindrait les PME à s’endetter pour s’acquitter de cette ponction fiscale, portant un coup potentiellement fatal à leur pérennité. Ces sociétés ne disposent pas des liquidités nécessaires pour faire face à une telle charge.
Le comité d’initiative tente de minimiser ce risque en alléguant que le texte de l’initiative prévoit des allègements en faveur des entreprises. Toutefois, ces derniers demeurent hypothétiques, dans la mesure où ils ne sont pas chiffrés et où leur définition dépendra de longs débats au Parlement fédéral dans le cadre de l’élaboration d’une loi d’application, elle-même soumise à référendum. Le flou juridique demeure donc total et une telle insécurité représente un véritable poison pour les entreprises qui doivent pouvoir anticiper pour réussir.
A cela s’ajoute que les héritiers ne pourront bénéficier de ces facilités que s’ils poursuivent l’exploitation de l’entreprise pendant 10 ans. A défaut, les allègements passent à la trappe. Les entrepreneurs devront donc vivre durant une décennie avec cette épée de Damoclès suspendue au-dessus de leur tête. Si cette condition n’est pas respectée, ils courent le risque de devoir verser rétroactivement l’impôt au taux de 20% sur la valeur vénale de la société au moment de l’ouverture de la succession.
En cas d’acceptation de l’initiative, les patrimoines supérieurs à CHF 2 millions subiraient une ponction de 20%, alors même que le substrat en question a déjà été frappé par un impôt sur le revenu et la fortune. Cela conduirait à une triple taxation. La Suisse rejoindrait alors le cercle très restreint et peu enviable des Etats qui, à l’instar de la France, taxent à la fois la fortune et les successions.
C’est le lieu de rappeler que Genève connaît déjà une progressivité extrême de l’impôt en comparaison intercantonale. En 2012, 1,2% des contribuables ont généré près de 34% de l’impôt sur le revenu alors que plus de 34% des contribuables n’ont pas payé un franc d’impôt. De même 2,5% des contribuables ont assuré plus de 82% de l’impôt sur la fortune. Avec un impôt sur les successions au taux de 20%, Genève deviendrait assurément un véritable enfer fiscal.
L’initiative met à mal le fédéralisme et prive les cantons de la possibilité de fixer de manière autonome les impôts sur les successions. Le centralisme fiscal prôné par ce texte conduirait immanquablement à une hausse généralisée du niveau d’imposition, qui a pu être contenu jusqu’à présent grâce à une salutaire concurrence intercantonale.